IATA : Le retour de Trump est une bonne nouvelle pour le secteur aérien
Genève, le 8 janvier 2025 – L’Association du transport aérien international (IATA, pour International Air Transport Association), à l’occasion de son Global Media Day, a présenté son bilan pour l’année 2023/2024, ainsi que ses analyses et perspectives pour l’année 2025. Retour sur une journée riche en informations, afin de mieux appréhender les défis et opportunités du secteur.

L’impact de l’aviation sur la richesse mondiale
L’IATA rappelle qu’il est important de saisir l’importance du secteur aérien dans l’économie mondiale. En 2023, ce secteur représente 87 millions d’emplois directs et indirects, pour une contribution de 4,1 trillions USD, soit 3,9 % du PIB mondial.
Des freins trop nombreux pour le développement du secteur…
Willie Walsh, directeur général de l’IATA, souligne les principales difficultés auxquelles le secteur aérien est actuellement confronté :
- L’infrastructure de contrôle aérien (ATC) obsolète qui génère des retards.
- Des régulations et taxes supplémentaires trop nombreuses, en particulier en Europe (Allemagne, France, Royaume-Uni, Pays-Bas), qui freinent le développement de l’aérien, alors que d’autres pays, comme l’Inde, encouragent le secteur.
- La fermeture de certains espaces aériens en raison des conflits actuels (Russie, Liban, Syrie, etc.), rendant certaines routes non compétitives et obligeant les compagnies à faire des détours.
- Le retard des OEM (fabricants d’équipements d’origine), incapables de livrer leurs composants, impacte la livraison des nouveaux avions. Cette situation se poursuivra l’année prochaine. Les 1802 avions attendus en 2025 ne seront probablement pas tous livrés. Par conséquent, l’âge moyen de la flotte mondiale d’avions n’a jamais été aussi élevé, atteignant 14,8 ans. Au total, 700 avions sont cloués au sol.
- La décarbonation avec le SAF (carburant d’origine durable) reste difficile en raison de sa disponibilité réduite et de son coût. Par exemple, la France impose 1 % de SAF, mais les producteurs n’en produisent pas suffisamment et reçoivent des amendes, qui sont ensuite répercutées sur les compagnies aériennes. Le SAF coûte en moyenne 3,4 fois le prix du carburant traditionnel.
- Dans la chaîne de valeur du secteur, les compagnies aériennes disposent de la marge la plus faible, avec seulement 3%, face aux pétroliers ou aux OEM, qui bénéficient eux de marges à deux chiffres.

…mais quelques perspectives encourageantes pour 2025
Mais Willie Walsh évoque aussi des raisons d’espérer pour la nouvelle année, notamment :
- Le retour du président américain Donald Trump, qui a largement soutenu les compagnies aériennes américaines pendant la pandémie grâce au « Cares Act », leur permettant de retrouver une meilleure santé financière rapidement. À l’inverse, l’administration suivante avec Joe Biden a créé des lourdeurs administratives avec de nombreuses régulations pour le secteur. L’espoir est que le second mandat de Trump reviendra sur les régulations instaurées par Biden.
- La baisse du coût du carburant grâce au développement des véhicules électriques sur de nombreux marchés, réduisant ainsi la demande sur les raffineries, qui peuvent ainsi produire davantage de carburant pour l’aviation.
- Un chiffre d’affaires attendu du secteur de 1 trillion USD pour 2025, pour un profit de 37 milliards USD, soit une marge de 3,6%. Le gain moyen par passager est de 7 USD, mais il reste trop faible pour garantir la pérennité du secteur et encourager les investisseurs, contre 5 % de marge en 2017.
- Des taux d’intérêt en baisse, permettant aux compagnies de se financer plus facilement.

Des grandes disparités en fonction des régions et des compagnies
- Une reprise post-covid qui reste disparate, toutes les régions ont retrouvés leurs niveaux de 2019 voir plus à l’exception de la zone Asie-Pacifique qui reste en retard.
- Les régions les plus profitables sont l’Amérique du Nord puis l’Europe mais par passager ce sont le moyen-orient avec un profit de 24 USD par tête suivi par l’Amérique du Nord avec 12 USD puis l’Europe avec 9 USD.
- De nombreuses compagnies continuent de perdre de l’argent, comme Spirit aux États-Unis (sous chapitre 11) ou ITA Airways en Europe. D’une manière générale, les compagnies les plus petites adoptent des stratégies de couverture du prix du carburant (Edging) souvent peu performantes, les rendent plus vulnérables aux volatilités du marché.


L’impact de la digitalisation dans l’expérience passager
Le rôle de l’IATA est également de soutenir des initiatives visant à simplifier le parcours des passagers, notamment le passeport digital (Digital ID en anglais), rendu possible grâce à la digitalisation de notre quotidien.
Explication : Le passeport digital est une solution qui permet aux passagers d’effectuer leur voyage de manière plus fluide et rapide en utilisant une version numérique de leurs informations d’identité, accessible via un appareil mobile ou un autre moyen numérique. Cette technologie permet de réduire les interactions physiques, d’améliorer la sécurité et d’accélérer les processus d’enregistrement et de contrôle à l’aéroport, tout en renforçant l’efficacité et la commodité pour les voyageurs. La digitalisation de nos vies quotidiennes, avec des outils comme les smartphones et les applications, rend cette évolution plus réaliste et pratique.
Etape 1 : création d’un passeport digital
La première étape consiste à créer son passeport digital. L’ensemble des démarches peut être effectué avec un smartphone, grâce à la caméra et au scan du passeport.
Etape 2 : Achat et réservation
Lors de l’achat, les informations du portefeuille digital permettent d’accélérer la transmission des données réglementaires (APIS) sans avoir à renseigner les informations manuellement. Cela comprend :
- Le visa
- Le e-passeport
- Les informations biométriques
- Le contrat corporate (le cas échéant)
- La commande auprès de la compagnie aérienne (réservation, billet et services annexes)

Etape 3 : L’enregistrement et l’embarquement
À l’aéroport, il n’est alors plus nécessaire de montrer son passeport et son visa physiques, l’ensemble des documents ayant été authentifiés préalablement. Grâce à la biométrie, les étapes d’enregistrement, de passage des frontières et d’embarquement se réalisent uniquement grâce à la reconnaissance faciale.



Cette technologie pour un passeport digital est prête pour un lancement prévu fin 2026 ou début 2027, mais cela reste très dépendant des autorisations des régulateurs et des gouvernements.
Conclusion
L’association IATA est globalement confiante dans les perspectives du secteur, et en particulier dans les pays en fort développement, qui vont concentrer la majorité de la croissance pour les années à venir. Malheureusement, l’association est aussi inquiète de l’augmentation des régulations et des taxes en Europe, qui vont freiner son développement sur le vieux continent. De l’autre côté de l’Atlantique, l’élection de Trump est jugée positivement, avec l’espoir que les régulations mises en place par l’administration Biden soient annulées.
Un problème majeur subsiste avec les fournisseurs (OEM), qui n’arrivent toujours pas à livrer de nouveaux avions à temps ni à remettre en service des avions cloués au sol (principalement en raison de problèmes moteurs). La situation ne devrait pas s’améliorer à court terme.
Pour les passagers, la bonne nouvelle est la baisse des tarifs attendue de 3,4% en moyenne pour 2025, rendue possible grâce à la baisse du prix du carburant, et peut-être un parcours aéroportuaire plus fluide grâce à l’adoption du passeport digital.