Paris, le 24 septembre 2020 – À l’heure où les flottes s’amaigrissent de leurs plus gros porteurs, jugés difficiles à remplir et parfois gourmands en carburant, l’attention se porte sur les avions de plus petit gabarit. Il y a un an, Air France annonçait avoir opté pour l’Airbus A220 pour remplacer une majeure partie de sa flotte moyen-courrier, tandis qu’Air Baltic a fait part de son souhait de faire de cet appareil le seul type avion de sa flotte à terme. Des annonces fortes, qui viennent corroborer un succès croissant de l’ex-Bombardier CSeries devenu Airbus A220.

Positionnement stratégique, accueil auprès des compagnies aériennes, expérience passager : Flight-Report décrypte pour vous les particularités de l’avion qui sera peut-être le monocouloir court et moyen-courrier de cette décennie.


Flexibilité et performance : réponse à de nouvelles dynamiques

Mis en service en 2016 et pouvant accueillir entre 100 et 160 passagers, l’Airbus A220 est un monocouloir de nouvelle génération qui se situe à la frontière entre l’avion régional et le monocouloir moyen-courrier traditionnel.

Comparaison par les capacité en sièges

Il est actuellement commercialisé en 2 versions : l’A220-100, modèle initial qui peut accueillir entre 100 et 135 passagers dans sa configuration la plus densifiée, et l’A220-300, version allongée dont la capacité varie entre 120 et 160 sièges. En version -100, l’A220 fait plutôt figure de concurrent pour l’Airbus A318 et l’Embraer E190-E2 (version remotorisée de l’Embraer E190), tandis que le -300 s’invite sur le terrain de jeu de l’Airbus A319, du Boeing 737-700 NG et de l’Embraer E195-E2.

Au niveau du segment qu’il adresse, l’A220 ne présente donc aucune nouveauté majeure, si ce n’est que sa capacité réduite par rapport à l’A320neo le rend plus facile à remplir et donc plus flexible à déployer, y compris sur des destinations niches. Un A320neo rempli à 65% est un A220 occupé à 80%. A l’heure des fluctuations de remplissage causées par les répercussions de la crise sanitaire, cette flexibilité se lit comme un véritable argument de vente.

Efficacité énergétique et historique l

Avec l’accentuation des considérations environnementales ces derniers mois, c’est surtout par ses performances que l’Airbus A220 se distingue. Fort d’une consommation moyenne de carburant de l’ordre de 2,4 L/100km par passager, il se situe au même niveau d’efficacité énergétique que l’A320neo, mais avec un nombre de passagers réduit.

Comparé à l’A319neo de même capacité, l’A220-300 représente un gain en consommation de carburant de l’ordre de 20%. Le constat est du même ordre lorsque l’on compare l’A220-100 aux E-jets d’Embraer. À cela, il faut ajouter que l’A220-100, tout en étant plus économe, surclasse les appareils de même taille par son rayon d’action (+18% en distance comparé à l’E190-E2), lui permettant d’être également déployé vers des escales plus éloignées.

Rappelons à ce titre que si Airbus est désormais propriétaire de l’avion, sa conception revient au constructeur canadien Bombardier qui s’est complètement retiré du programme début 2020.

Un démarrage difficile mais des compagnies aériennes satisfaites

Actuellement en service chez 7 compagnies aériennes dans le monde et sur 4 continents, l’A220 a connu un succès mitigé auprès des transporteurs au lancement du programme par Bombardier. Les répercussions de la crise sanitaire n’ont pourtant pas entaché le récent regain d’intérêt pour l’appareil, et ont peut-être même mis l’accent sur les avantages d’un avion versatile.

En Europe, Swiss et Air Baltic (les deux compagnies de lancement respectives des versions -100 et -300 de l’appareil) ont progressivement fait de l’A220 le fleuron de leurs flottes moyen-courrier. Il dessert désormais la quasi totalité de leurs destinations européennes. En France, c’est Air Austral qui devrait devenir à la fin de cette année la première compagnie française à opérer l’appareil.

En Amérique du Nord, l’adoption est plus progressive. Delta et Air Canada positionnent l’appareil exclusivement sur des liaisons domestiques, mais sur un plus grand spectre de distances : aujourd’hui, Air Canada opère d’ailleurs le vol régulier en Airbus A220 le plus long au monde entre Montréal et Calgary (environ 4h30 de vol).

En Afrique comme en Asie, et malgré les récentes livraisons à Egyptair, l’utilisation est plus confidentielle. L’Amérique du Sud, berceau du constructeur brésilien Embraer, n’a quant à elle encore enregistré aucun vol commercial en A220 et aucune commande de la part d’une compagnie aérienne de la région.

Perspectives de  l

Bien que le secteur soit plongé dans une longue crise, de nombreux signaux positifs entourent les perspectives de l’Airbus A220. D’une part, l’appareil est aussi bien plébiscité par les compagnies à bas coûts (Air Baltic, JetBlue) que par les compagnies traditionnelles (Swiss, Air France). D’autre part, des compagnies qui devraient débuter leur service dans les prochains mois ou les prochaines années ont choisi l’A220 comme fer de lance de leur flotte : c’est le cas de l’américaine Breeze Airways (dont l’envol est annoncé pour 2021) et de la britannique Odyssey Airlines (début des opérations également prévu pour 2021).

Enfin, à la suite de la chute du trafic provoquée par la propagation de la COVID19 dans le monde, nous observons une remise en service plus rapide des A220s comparé aux autres appareils moyens-courriers chez les compagnies clientes de l’avion.

Expérience passager : un gain de confort significatif

Plus encore que les remotorisations d’avions anciens, l’arrivée d’une nouvelle coque est souvent l’occasion d’explorer de nouvelles solutions en cabine, des idées porteuses d’un meilleur confort pour le passager. L’A220 semble en être un parfait exemple.

Comparaison des notes Flight-Report de l

Les notes « cabine » attribuées par les contributeurs de Flight-Report font état d’un net gain en confort en A220 comparé aux avions du même segment. Pour Swiss, la note « cabine » moyenne de l’A220 est de 8,66/10 contre 8,06/10 pour l’ensemble de la flotte Swiss moyen-courrier. Chez Air Baltic, l’écart est encore plus marqué : 8,02/10 contre 7,04/10.

Plus généralement, comparé à tous ses pairs, l’A220 sort largement gagnant en termes de confort cabine avec une moyenne de 8,6/10, soit 1,2 point de plus en moyenne que le 737-700 qui clôt le classement. L’état encore relativement neuf des cabines participe certes à cet engouement, mais ce sont d’autres points qui retiennent surtout l’attention des membres du site.

Cabines et sièges

Nos contributeurs ont été sensibles au gain d’espace personnel pour le passager : avec une configuration maximale en 5 sièges de front, l’A220 est le monocouloir qui offre le meilleur ratio largeur cabine / nombre de sièges sur son segment. Si la configuration en 2-2 des E-Jets d’Embraer permet à l’ensemble des passagers d’occuper soit un siège hublot soit un siège couloir, la configuration 3-2 des A220s permet à 80% des passagers (taux moyen de remplissage des vols moyens-courriers pré-Covid) de ne pas être assis à un siège milieu, contre 60% pour les configurations 3-3 des 737 de Boeing et de la famille A320 d’Airbus.

Hublots

Un autre atout de l’A220 est son hublot dont la grande taille a souvent été appréciée par les contributeurs de Flight-Report. Légèrement plus petit en surface que celui des E-Jets d’Embraer, le hublot de l’Airbus A220 offre un champ de vision beaucoup plus grand pour les passagers que les B737 et les appareils de la famille A320. Ces grands hublots fournissent aussi une meilleure luminosité en cabine pendant la journée.

Enfin, l’écran supérieur à chaque demi-rangée de sièges, proposé en option sur l’A220, bien que de taille relativement réduite, rencontre les faveurs de la majorité des contributeurs du site.


Conclusion

Plus économe, plus flexible, plus confortable : l’Airbus A220 semble quasiment faire l’unanimité auprès des compagnies aériennes et des passagers.

Sera-t-il pour autant l’avion incontournable du voyage de demain ? L’arrivée de l’A220 a certes plombé les perspectives de l’Airbus A319neo, et le lancement un temps murmuré d’une version encore allongée, l’A220-500, pourrait de même aboutir à la cannibalisation de l’A320neo. Mais les réticences des compagnies aériennes à acquérir de nouveaux avions en ces temps difficiles, de même que la rationalisation des flottes porteuse d’économies, pourraient réprimer les ambitions du programme A220 à inonder le marché du court et moyen-courrier.

De la rapidité de la reprise de l’activité aérienne dépend donc l’avenir du programme A220 qui reste, malgré des atouts incontestables, incertain.


Méthodologie

Moyenne des notes cabines attribuées par les contributeurs de Flight-Report pour les différents appareils mentionnés. 6.721 récits de vols ont été comptabilisés pour établir ces statistiques.
Carte du réseau A220 reflétant le trafic effectif à fin Août 2020.
Commandes Airbus annoncées jusqu’en Août 2020.
Données de trafic extraites de Flightradar24.

Sources : Sites officiels des constructeurs et compagnies aériennes, Leeham News
Crédits photo mise en avant : © Airbus 2018 – Photographie de S. Ramadier

Infographie A220 monocouloir de demain